Balade amiénoise sous un soleil de plomb. Un peu d'ombre et de fraîcheur chez Bulle en Stock, librairie spécialisée dans la BD. Je n'y avais encore jamais mis les pieds et me contentais à chaque fois d'observer la toujours très alléchante vitrine... Après une bonne demi-heure passée à feuilleter et fureter, j'ai jeté mon dévolu sur le premier tome de la BD Les Echos invisibles. que je chronique aujourd'hui pour la BD du mercredi chez Mango.
Balthus est assis en couverture auprès d'un arbre dont les feuilles, si l'on regarde de plus près ne sont que des photos de Monica. Monica est la plus belle rencontre de sa vie, son grand amour. Ce cliché, il lui a volé, dérobé dans un parc alors qu'il pensait s'exécuter suffisamment discrètement pour ne pas être remarqué par cette jolie brune. Pris sur le fait, il se sent un peu ridicule, mais quelle n'est pas sa surprise lorsque la jeune femme lui demande de revenir le lendemain avec la photo développée...
Alors pourquoi cette scène près de l'arbre transpire la nostalgie et la tristesse ? Parce que la première page vient vite révéler la triste situation. Balthus vient de perdre l'amour de sa vie, Monica est morte et le voilà anéanti, dévasté. Les premières planches sont un va-et-vient constant entre l'insupportable présent et les fantômes du passé qui resurgissent à chaque instant. Une solution s'impose à lui: tout quitter pour vivre seul, s'éloigner d'un quotidien trop douloureux. Vingt années passent durant lesquelles il se reconstruira, pas à pas avec toujours au fond de lui cette plaie qui ne cicatrise pas. Le jour de son départ, Balthus a découvert qu'il possédait un don, un sixième sens qui va venir bouleverser sa relation avec les autres, son rapport au monde.
En essayant d'enfouir sa douleur, notre jeune homme enterre sa première passion, celle sans qui sa rencontre avec Monica n'aurait jamais eu lieu: la photographie. Mais c'est sans compter sur l'arrivée fortuite d'une jeune étudiante qui va venir réveiller ses vieux démons et offrir à sa vie un nouveau tournant, chose qu'il pensait à jamais impossible...
Voilà un choix que je ne suis pas prête de regretter. Le hasard a tellement bien fait les choses. Quel talent fabuleux que celui de Grazia La Padula qui nous offre des planches desquelles il émane tant de belles émotions. Du bonheur du couple qui s'aime au coeur de couleurs chaudes et chaleureuses à la séparation des êtres dans une ambiance lourde et sombre, nous suivons les yeux plein de larmes notre héros qu'elle parvient vite à rendre profondément touchant et expressif. Le scénario, bien que ce tome présente peu d'actions fortes, rend parfaitement compte de la "psychologie" du héros. Comment rester insensible à la douleur du personnage qui souffre de cette rupture dont il ne se remettra jamais ? Avec brio, paysages et héros ne font rapidement plus qu'un et les statues du parc elles-mêmes semblent pleurer au côté de Balthus. J'aime cette manière de dépeindre avec pudeur une peine aussi douloureuse que celle de la rupture (quelle que soit sa forme d'ailleurs...) J'attends impatiemment la sortie du second volet qui je l'espère arrivera très bientôt. En attendant, je vous invite plus que jamais à ouvrir ce petit bijou dont je suis tombée amoureuse, et assurément, nombreux sont ceux qui se laisseront séduire par cette précieuse lecture...