On ne parle que de lui, son roman La Délicatesse est LE rendez-vous livresque estival. Alors comment résister à l'envie de le découvrir un peu plus ? C'est donc avec Nos séparations que j'ai voulu confirmer/infirmer mon plaisir de savourer le travail de monsieur Foenkinos.
Nous suivons donc dans ce roman, Fritz (qui n'assume pas toujours son prénom) et Alice. Deux personnes que tout oppose. Sauf qu'Alice aime Fritz et Fritz est fou d'Alice. Jusque là, configuration classique d'une histoire d'amour, avec une pointe d'humour à la Foenkinos, de romantisme et juste ce qu'il faut de sexe pour que l'on s'attache assez vite à eux. Très rapidement, une séparation, après un dîner savoureux chez les parents d'Alice, dîner drôlissime où les atomes crochus entre Fritz et la famille d'Alice n'ont pas l'air d'être au rendez-vous.
" Je me suis dit, c'est peut-être la dernière fois que je la vois. C'est finalement un sentiment que j'éprouve à chaque fois que j'accompagne quelqu'un à la gare. Cette ligne droite qui devient vide progressivement, et nous restons là dans la nouvelle absence de l'autre."
Alors arrive Céline. Céline est une femme toute de rouge vêtue. Une nouvelle aventure s'offre à Fritz.
" Céline Delamarre est venue chez moi. Alors que nous aurions dû nous jeter l'un sur l'autre, elle est restée à contempler ma bibliothèque. Je l'ai regardée regarder mes livres, et j'ai aimé cet instant qui mélangeait la féminité et les pages. Je me suis approché d'elle, j'ai relevé sa jupe et c'est seulement une fois qu'elle avait les genoux découverts que je l'ai embrassée."
Sauf que très vite Alice revient. Céline s'efface alors, sans bruit, mais pour mieux exploser l'équilibre créé entre nos deux amoureux.
" Moi qui avais mené une vie si rangée, moi qui me sentais encombré par la morale et la nécessité permanente de bien faire, j'avais subi ce qu'aucun homme ne voudrait subir. Surtout, j'avais fait souffrir la femme que j'aimais, souffrir si violemment, et à ma plaie s'était toujours associée la douleur de la sienne. Autant le dire tout de suite: en dix ans jamais je n'ai eu de nouvelles d'Alice. Les années ont passé dans ce silence. Toutes les combinaisons de lettres possibles ne changeraient rien au saccage amoureux."
Foenkinos nous peint un personnage qui, somme toute, est un homme assez simple, constamment défini comme quelqu'un de relativement stable. Mais c'est un commettant une erreur de taille la veille de son mariage avec Alice qu'il va payer le prix fort de ses choix. Il va perdre la femme qui l'aime et qu'il aime. Nos Séparations sera donc l'histoire de ses nombreuses ruptures avec Alice. De leurs retrouvailles intenses , mais également de leurs séparations, souvent douloureuses.
"C'était rafistolé, mais nous avions tellement envie de ce rafistolage. Jamais je n'avais éprouvé un tel désir de rafistolage avec quelqu'un."
On pourrait penser que l'aspect répétitif de ses séparations finirait par nous lasser mais non. A chaque fois, retrouvailles et ruptures se font dans un contexte particulier qui nous fait redécouvrir ce couple d'un regard toujours nouveau. On les suit sur plusieurs années, ils évoluent, tant dans leurs attentes que dans leurs relations aux autres. La question soulevée ici est celle du lien qui unit deux êtres qui s'aiment mais ne cessent de se perdre par erreur, par lâcheté, par facilité, par raison. Deux êtres qui pourtant, peuvent difficilement exister l'un sans l'autre. Et cette situation contamine aussi les liens entre les personnages secondaires que Foenkinos arrive à rendre profondément attachants également. J'ai adoré le couple Paul et Virginie et leur récit de rencontre. Le personnage de Lise est peut-être un de ceux qui m'a le plus touchée.
" Nous sommes allés chez Ikéa et nous nous sommes disputés chez Ikéa. Dans ce grand magasin, ils devraient employer un conseiller conjugal. Car s'il existe un endroit où le coeur des couples se révèle, c'est bien là. Je me demande même si tous ces meubles à construire ne sont pas un grand prétexte pour semer la zizanie sentimentale."
Bref, cette deuxième lecture vient confirmer mon coup de coeur pour l'auteur. J'aime littéralement sa manière de dépeindre les couples. Relations passionnées, chaotiques, bancales, équilibrées, injustes ou qui s'essoufflent. Il décortique avec beaucoup d'humour les rapports humains et il m'est souvent arrivé de rire des situations décrites. Et parfois, au détour d'une page, le rire disparaît au profit d'un sourire triste. Parce que chacun se retrouvera, dans l'une ou l'autre de ces séparations...
Mon article sur La Délicatesse est ici. Le dernier Foenkinos est sorti et bien présent chez mes copines libraires. Il va falloir que je prenne sur moi pour ne pas aller le chercher aujourd'hui alors que tant d'autres livres m'attendent encore sur ma PAL...