Deux films, deux ambiances on ne peut plus différentes... D'un côté le héros, l'homme de toutes les situations, celui qu'aucune péripétie ne va effrayer. De l'autre, un homme, héros à sa manière, qui devra affronter seul, le plus grand drame de sa vie. On sort de l'un incapable de nier que finalement, c'est terriblement excitant de voir un bon film d'action , on quitte l'autre encore assommé par le poids oppressant d'une agonie de deux longues et interminables heures.
Skyfall de Sam Mendes
Oh mon Dieu. Je ne sais pas ce qu'il m'arrive mais me voilà très bon public des films d'action et des histoires de super-héros. Il y a deux ans, un grand passionné de ciné avait fortement insisté pour que je regarde Rocky, m'assurant sans aucun doute que j'allais apprécier. J'avais ri, en petite impertinente, persuadée du contraire. En quelques séances de rattrapage, j'ai dévoré l'intégrale, fascinée par cette oeuvre incroyable. Même contexte avec le somptueux The Karate Kid (2010) qui m'avait arraché des larmes et que j'avais trouvé de toute beauté, malgré tous mes préjugés sur ce genre de films. Je ne pensais pas renouveler l'expérience avec les James Bond (que je méprisais ouvertement) et voilà que Skyfall m'a littéralement scotchée. Quel fabuleux moment ! Une intrigue pleine de rebondissements, riche de symboles, des personnages piquants, un Javier Bardem qui perd de son sex-appeal mais qui se révèle un monstre d'une savoueuse cruauté. Tous les ingrédients sont là et la magie opère. (Mention spéciale pour le générique merveilleusement pensé et la BO d'Adèle.) Bref, comme une furieuse envie de regarder Casino royale.
Amour de Haneke
C'est dans l'intimité du couple Trintignant /Riva au jeu magistral que le spectateur pénètre. Deux êtres qui ont passé toute leur vie l'un auprès de l'autre, au rythme de leur petit quotidien doux et serein. Jusqu'au jour où Jeanne montre quelques signes de faiblesse: absences, maladresses, oublis. Le verdict tombe rapidement, la cruelle vieillesse rappelle qu'elle est bien là et fait son oeuvre. Après une hospitalisation, Jeanne rentre chez elle, hémiplégique. Son époux prend soin d'elle, malgré le bouleversement que cela implique pour eux. Il joue alors son dernier rôle, témoin impuissant d'un long adieu et accompagne sa douce vers l'inévitable...
Non, je n'ai pas aimé follement ce Haneke. Parce que je l'ai vraiment subi. J'ai eu mal, j'ai étouffé, je me suis laissée prendre au piège, j'ai pris une claque. Le fantôme de ma grand-mère était là, réveillant des douleurs, des souvenirs, des gestes, des odeurs, des mots, des mains qui se frôlent chaque jour "encore une dernière fois". Je suis ressortie de cette séance tourmentée, gagnée par un malaise difficile à dissiper. Haneke saisit la mort qui oeuvre lentement, qui dévore le corps et l'être cher, froidement, sans aucune larme. Il dissèque la fin d'un amour et filme les rares proches dans leurs maladresses, dans cette nécessité inacceptable de se résoudre aux adieux. Lorsque Jeanne laisse échapper son dernier souffle, c'est pour nous une bouffée d'oxygène libératrice. On "revit" quand elle s'éteint. Un cinéma fort, difficile à digérer, une oeuvre grinçante qui ne laisse pas indemne.