Encore un livre à la thématique musicale...
Fanny est sage-femme et va rencontrer Aurélie et Louis lors d'un accouchement singulier... Touchée par leur histoire, elle restera en contact avec eux et sera amenée à les revoir.
Louis, en dehors du fait qu'il soit un économiste très investi dans son travail, est également professeur de piano. Il donne même des cours et c'est ce qui le conduira à se rapprocher de Fanny, qui souhaite pour une raison bien particulière, renouer avec l'univers musical : une maladie la condamne en effet à devenir sourde.
Les rendez-vous musicaux se suivent et chaque jeudi Fanny apprivoise les touches du piano droit... Jusqu'au jour ou certaines notes ne seront plus audibles par la jeune femme. Bouleversé par cette élève singulière, Louis va s'investir du mieux qu'il peut pour donner tout son sens à la musique, sans pour autant la réduire à un son...La complicité s'installe, mais pour combien de temps ?
Pour un premier roman, inutile de dire qu'il s'agit là d'une belle entrée en matière. Hugo Boris touche à des thèmes universels (maladie, amour, mort) et ne tombe pas dans le piège des clichés. Il crée des personnages plein de blessures qui veulent guérir au contact de l'autre. L'évolution de leur relation est surprenante et il nous tarde de savoir ce qu'il adviendra de nos deux personnages tant Boris parvient à les rendre particulièrement attachants. En ce qui me concerne, j'ai peut-être été plus sensible à l'univers de Louis que celui de Fanny, qui apparaît souvent sur son lieu de travail au milieu des femmes qui accouchent.... Je pense d'ailleurs que je ne m'arrêterai pas à cet ouvrage et ne tarderai pas à poursuivre la lecture d'autres textes, histoire de confirmer ou non ma première belle impression...
Je laisserai enfin, la conclusion de cette article à Arthur Rimblaud (oui, rien que ça) dont les vers ponctuent le livre, et ce pour mon plus grand plaisir...
"L'étoile a pleuré rose au cœur de tes oreilles,
L'infini roulé blanc de ta nuque à tes reins
La mer a perlé rousse à tes mammes vermeilles
Et l'Homme saigné noir à ton flanc souverain."
En quelques mots...
« Elle n’est pas sourde, elle le devient. Rester assise dans une baignoire dont l’eau lentement se retire, s’étrangle avec le vertige d’une toupie. L’œil du cyclone qui la regarde, sa peau qui doucement se granule. Une souffrance à huis clos, un silence à crier où l’on entre malgré soi, comme dans la lumière un insecte affolé. Et voila qu’on se promène du lundi au samedi avec les oreilles endimanchées. Deux tympans habillés pour l’enterrement. »
« Les deux contours glissent dans sa main, qu'elle vide sur le sommet du piano. Elle pose ses doigts à plat sur le bois : il est tiède.Louis, d'un geste sûr, fait résonner l'instrument. Elle se sent d'abord aussi indiscrète que derrière une porte, à écouter une conversation personnelle. Elle écoute avec ses mains, mais l'indiscrétion n'est pas moindre. Les vibrations irradient ses doigts, franchissent le poignet, remontent doucement jusqu'au coude, passent, affaiblies, dans l'épaule, viennent mourir dans sa poitrine. Elle sent parfaitement dans ses mains quand le piano s'exclame, ralentit, s'adoucit, ou, au contraire, prend une voix sentencieuse. Elle fait glisser ses paumes sur la planche, dans l'intervalle oblique des barres de table. »
Bonne lecture
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